
Souterrains, galeries et autres cavités ont de tout temps servi de refuge à des populations menacées ou martyrisées. Un univers passionnant que nous font découvrir les chercheurs Jérôme et Laurent Triolet, pointures internationales dans le domaine.
Les deux frères ont grandi en Touraine, une région riche en souterrains dans lesquels ils sont tombés comme Obélix dans sa marmite de potion magique. Leur hobby s’est ensuite transformé en passion dévorante dès l’adolescence.
Les Triolet ont visité beaucoup de pays, avec cette constante dans leurs observations : le génie humain dépasse toujours l’imaginable, surtout quand la tâche semble insurmontable.
Si le monde entier regorge d’endroits de ce type, la région la plus célèbre reste la Basilicate italienne, entre Naples et Bari. Là où se trouve l’immanquable Matera. Un emmental gigantesque creusé dès le néolithique, occupé tour à tour par les Grecs et les Romains, avec une architecture fascinante. Un vrai décor de cinéma.

« À toutes celles et ceux qui sèment. »
Voilà la merveilleuse dédicace, aussi poétique que reconnaissante, qui ouvre son ouvrage Les clés du champ. Un envoi qui touche bien au-delà du sourire phonétique : car si l'amour fait tourner le monde, c'est bien le champ et ses exploitants qui lui permettent de survivre.
François Parcy est chercheur en biologie des plantes.
Ses missions : comprendre comment elles fleurissent, et comment leur histoire a pu s'écrire d'aussi belle façon. Et s'il parle des plantes et de leur domestication, c'est bien de l'humanité dont il est question.
Son passé, et son avenir. « Les plantes intéressent tout le monde car elles sont le grand moyen sur terre de capter l'énergie du soleil et de créer la vie, écrit-il. C'est le début de la chaîne alimentaire et elles sont l'objet de toutes les tentations. Tout le monde veut les manger, et celles qui vivent aujourd'hui le sont parce qu'elles ont réussi à se défendre et à survivre. » Éclairant !

Le rose est une drôle de couleur.
En Occident, elle apparaît au XVIIIe siècle et est plutôt portée par les hommes. Alors qu’en Asie, au Japon notamment, les cerisiers en fleurs l’ont depuis toujours distingué du rouge et du blanc. Cette couleur de la rareté va progressivement correspondre à celle de l’excès.
À partir du XIXe siècle, le rose va de plus en plus se rapprocher du violet pour représenter la transgression. Il va aussi se trouver dépendant de la nouvelle symbolique du rouge, qui s’apparente au fur et à mesure à la teinte du diable et de la mort. Il n’est pas le vice, mais la proximité avec celui-ci ; pas la pornographie, mais l’érotisme ; pas le communisme, mais le socialisme.
Le chercheur Pierre-William Fregonese explore ce rose ambigu qui est relégué très loin dans le classement des couleurs préférées. Tout en soulignant ce paradoxe : le monde déteste peut-être le rose mais son succès commercial, lui, est indéniable.

Chercheur parisien à la fois spécialiste de bioacoustique et d’écoacoustique, Jérôme Sueur possède une vertu finalement très rare : se mettre à la hauteur du profane pour mieux l’emmener dans un monde presque imaginaire, celui du vivant, du tout-petit, avec ses sons et ses silences. Ces silences qu’on a tendance à tous trop vite oublier, alors qu’on les connaît par cœur. Ce sont ceux qui s’installent quand s’évapore le bruit d’un chevreuil qui vient de détaler sans qu’on ait pu l’apercevoir.
Son livre, Histoire naturelle du Silence, est un ouvrage qui insiste aussi sur la différence entre bruit et son, tant le premier est un empêchement et le second une divinité. « Le bruit est un ennemi de masse qui ne se camoufle pas », écrit Jérôme Sueur. Qui parie que le silence deviendra une valeur clé dans un avenir proche.

Pour tout apprendre sur les yōkai, le mieux serait de voler jusqu’au Mononoke Museum à Miyoshi, dans le sud du Japon. On y contemplerait alors la collection constituée par Yumoto Koichi qui balaie quatre siècles de création artistique. Autre façon de voyager : plonger dans Yōkai, créatures et esprits surnaturels du Japon, beau livre sur la façon dont ont été illustrés ces drôles de… ces drôles de quoi, d’ailleurs ? Des esprits, des démons, des fantômes, des entités indéfinissables ?
À l’origine, ces créatures chimériques représentaient les tourments inexpliqués dont souffraient les Japonais. Ainsi l’abura-akago, cet être aux traits enfantins qui adore lécher l’huile de la lampe dans l’obscurité. Ou l’akaname, qui aime se repaître de la crasse des baignoires — un message clair lancé aux maîtresses de maison négligentes. Des récits sans limites, donc, tout comme cette croyance japonaise : toute chose possède un esprit qui exige des humains qu’ils se montrent respectueux du moindre objet.

Francis Hallé est né en 1938 en Seine-et-Marne, pas très loin de Paris. Il est botaniste, biologiste et dendrologue (la science des arbres). Docteur en biologie et en botanique, diplômé de la Sorbonne, ancien professeur de botanique à l’Université de Montpellier, il est sans doute aujourd’hui le meilleur connaisseur des arbres du monde. En 2013, le réalisateur Luc Jacquet lui consacrait un long documentaire diffusé au cinéma, Il était une forêt. Toute sa vie a été vouée aux arbres, notamment aux forêts tropicales primaires.
À 83 ans, Francis Hallé travaille encore, parcourant le globe, écrivant un livre de référence après l’autre. Cette année, ce jeune octogénaire s’est impliqué dans deux nouveaux très gros chantiers : réfléchir à la replantation des forêts de la région de Bordeaux dévastées par les incendies de cet été et mettre sur pied la création d’une forêt primaire en Europe.